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03.04.2025
Directive européenne sur la transparence des rémunérations : ce que les dirigeants doivent savoir
À l’heure où la compétitivité passe aussi par l’exemplarité, la transparence salariale devient un levier stratégique pour les entreprises industrielles. La directive européenne du 10 mai 2023 impose une nouvelle donne : d’ici juin 2026, les organisations devront s’y conformer sous peine de sanctions. Derrière l’objectif d’équité salariale entre femmes et hommes, c’est une transformation en profondeur de la politique de rémunération qui se dessine.
Dans l'industrie, souvent marquée par une forte culture de la discrétion salariale et des pratiques hétérogènes entre sites, cette directive prend un relief particulier.
Nouvelles obligations pour les employeurs : ce qui change avec la directive
Transparence dès le recrutement : trois règles clés
À compter de 2026, de nouvelles règles de transparence salariale s'appliqueront, avec des obligations différentes selon la taille des entreprises. Trois piliers sont à retenir :
- Mention obligatoire d'une fourchette de rémunération dans les offres d'emploi.
- Interdiction pour l'employeur de demander le salaire antérieur d'un.e candidat.e.
- Droit d'accès aux informations sur les écarts de salaires par genre et par catégorie de poste pour tous les salariés.
Certaines de ces obligations, comme l'indication du salaire dans les offres d'emploi et l'interdiction de questionner les candidats sur leur historique de rémunération, s'appliqueront à toutes les entreprises, quelle que soit leur taille. D'autres obligations, comme le reporting détaillé sur les écarts de rémunération, concerneront uniquement les entreprises de 100 salariés ou plus.
Reporting et calendrier progressif de mise en œuvre
Un reporting standardisé deviendra obligatoire pour évaluer les écarts entre femmes et hommes, avec un calendrier progressif selon la taille de l'entreprise :
- Entreprises de 250 salariés ou plus : mise en œuvre au plus tard le 7 juin 2027 avec rapport annuel ;
- Entreprises de 150 à 249 salariés : mise en œuvre au plus tard le 7 juin 2027 avec rapport tous les 3 ans ;
- Entreprises de 100 à 149 salariés : mise en œuvre au plus tard le 7 juin 2031 avec rapport tous les 3 ans.
Les entreprises devront :
- Calculer les écarts salariaux selon des critères standardisés (poste, niveau, ancienneté) ;
- Publier régulièrement ces données ;
- Justifier toute différence dépassant un seuil de tolérance fixé par la directive.
Clarification importante sur le calendrier :
Bien que la directive doive être transposée dans le droit national d'ici le 7 juin 2026, certaines obligations entreront en vigueur progressivement selon la taille des entreprises. Il est essentiel que chaque organisation identifie son échéance spécifique pour se préparer efficacement.
Les entreprises devront calculer les écarts salariaux, publier régulièrement ces données et justifier toute différence dépassant un seuil de tolérance fixé à 5 %, sous peine de devoir réaliser un audit salarial. Ce seuil s’applique à des postes considérés comme équivalents, au regard des compétences, responsabilités et conditions de travail.
Définition élargie de la rémunération
La directive définit la "rémunération" de manière large, incluant non seulement le salaire de base mais aussi "tout autre avantage, payé directement ou indirectement, en espèces ou en nature". Cela englobe notamment :
- Les primes et bonus ;
- La compensation des heures supplémentaires ;
- Les indemnités de logement et de repas ;
- L'assurance santé ;
- Les retraites complémentaires ;
- Les stock-options ;
- Les allocations diverses.
Cette définition implique une analyse approfondie des pratiques, souvent très hétérogènes dans les PME industrielles. Les employeurs devront examiner l'ensemble des composantes salariales pour garantir leur conformité.
Risques en cas de non-conformité : sanctions et impact réputationnel
Sanctions prévues par la directive européenne
La directive prévoit des sanctions financières et administratives en cas de non-respect des obligations. Les autorités nationales disposeront d’un cadre juridique pour :
- Infliger des amendes proportionnelles à la taille de l’entreprise ;
- Ordonner des rectifications de salaires ;
- Imposer des actions correctives dans un délai imparti.
Charge de la preuve inversée et indemnisation des victimes
Un changement majeur concerne la charge de la preuve : en cas d'allégation de discrimination salariale, ce sera désormais à l'employeur de prouver qu'il n'y a pas eu discrimination. Ce renversement impose aux entreprises une documentation rigoureuse sur leurs pratiques salariales et leurs critères d'évaluation.
La directive prévoit également des dispositions sur l'indemnisation des victimes, incluant le recouvrement des arriérés de salaire et des avantages liés.
Comment préparer votre entreprise à la mise en conformité ?
Réaliser un audit des pratiques existantes
La première étape vers la conformité passe par un audit approfondi :
- Analyse des grilles, bonus, promotions et variables ;
- Évaluation des critères d’évolution et progression ;
- Comparaison avec le marché (via outils comme Figures ou WTW).
Mettre en place un plan structuré
Pour assurer une transition fluide :
- Réalisez un audit préliminaire des pratiques de rémunération.
- Analysez les écarts éventuels par poste comparable.
- Mettez en place un suivi régulier des données salariales.
- Formez les équipes RH et les managers aux biais inconscients.
- Planifiez une communication claire et régulière sur la politique salariale.
Conclusion : une opportunité stratégique à ne pas manquer
La directive européenne sur la transparence des rémunérations est bien plus qu’une contrainte réglementaire. Elle représente une opportunité stratégique pour :
- Renforcer sa marque employeur ;
- Améliorer l'engagement collaborateur ;
- Se positionner comme acteur responsable d’ici 2026.
En anticipant ces changements dès maintenant, vous transformerez cette obligation légale en avantage compétitif durable !
Pour aller plus loin : Découvrez la fiche métier d'un(e) Responsable Compensation & Benefits
Sources :
- ANDRH - Que va changer la directive sur la transparence des rémunérations ?- Février 2025
- Consilium - Transparence des rémunérations dans l'UE - Avril 2023
- Laison Sociale - 112-40 Quand et comment l’employeur peut-il justifier une différence de traitement entre salariés ?
- Direction des affaires juridiques - Lettre de la DAJ – Une directive européenne vient renforcer l’application du principe de l’égalité des rémunérations entre les femmes et les hommes - Juin 2023
- Strada lex - UE : Publicité des salaires et inversions de la charge de la preuve pour discrimination salaire - Décembre 2023